Projets de torpilles
CONCEPTIONS DE WALTER
- L'intérêt du Dr Walter pour les sous-marins
s'étend aux torpilles, pour lesquelles il entreprend de
concevoir une propulsion au peroxyde d'hydrogène. Son
bureau d'études produit quelque 16 modèles
différents, dont trois sont en production à la fin
de la guerre, bien qu'aucun ne soit entré en service. Les
différences entre ces modèles résident dans
la longueur et la flottabilité négative des
torpilles, plutôt que dans le système de propulsion,
qui est essentiellement le même.
- Le système de propulsion du T VII (G7ut)
Steinbarsch (perche) en est un exemple typique. Il utilise
cinq substances : Dekalin (carburant) ; Ingolin
(oxydant) ; eau douce (liquide de refroidissement) ; Helman
(catalyseur) ; et air comprimé (pressuriseur).
- Dès que la torpille commence à se déplacer
dans le tube, une soupape est ouverte, libérant l'air
à haute pression pour agir sur le Dekalin, le
Helman, l'Ingolin et l'eau douce, bien que les
choses soient arrangées de telle sorte que les quatre
n'arrivent pas dans la chambre de combustion
simultanément. Les premiers arrivés sont le
Helman et le Dekalin, suivis très peu de
temps après par l'eau et, après environ une seconde
de retard, l'Ingolin. Le Helman s'auto-allume,
déclenchant la réaction, après quoi
l'approvisionnement en Helman cesse. L'Ingolin et
le Dekalin sont pulvérisés à travers
des buses concentriques à une extrémité de
la chambre tandis que l'eau est pulvérisée à
partir de l'autre extrémité.
- L'eau permet de maintenir la chaleur de la réaction dans
des limites gérables (2 300 degrés Celsius). Elle
se transforme également en vapeur à haute pression,
qui passe ensuite dans une turbine à flux axial à
un seul étage, générant 435 ch à 23
000 tr/min, qui est démultipliée pour
entraîner deux hélices contrarotatives à une
vitesse de 1 550 tr/min. Ce réducteur est également
utilisé pour compenser l'effet de couple de la turbine, le
premier engrenage (le plus lourd) tournant dans le sens inverse
de la turbine. Cela donne une vitesse de 45 nœuds et une
portée de 8 750 yards (8 000 mètres).
- Comme la torpille contient des ingrédients aussi
volatils, il est essentiel de prendre des mesures de
sécurité adéquates. Le réservoir
d'eau douce, de forme cylindrique et d'environ 1,83 mètre
de long, occupe la partie centrale du corps principal de la
torpille. Le réservoir de Dekalin est placé
à l'avant du réservoir d'eau et le réservoir
d'Ingolin à l'arrière, ce qui permet non
seulement de les séparer physiquement mais aussi de
s'assurer qu'en cas de rupture (par exemple, lors d'une attaque
aux charges de profondeur), les deux substances sont tellement
diluées par l'eau qu'elles ne réagissent pas entre
elles. Une autre précaution est la présence d'une
valve à levier dans la conduite d'alimentation en azote
qui n'est libérée que lorsque la torpille quitte le
tube, ce qui garantit que la torpille est bien loin de l'U-Boot
avant que la réaction ne commence.
- L'eau douce est de loin l'ingrédient le plus lourd (et
le plus encombrant) ; une variante appelée
Schildbutt est en cours de développement et utilise
de l'eau de mer à la place, ce qui permet de transporter
beaucoup plus de Dekalin et d'Ingolin et
d'étendre la portée à 19 700 yards (18 015
mètres). Un développement encore plus poussé
est le Steinwal qui non seulement utilise l'injection
d'eau de mer, mais remplace également l'air
comprimé (et son lourd conteneur) par des pompes, donnant
une portée encore plus grande de 23 000 yards (21 030
mètres).
D'AUTRES PROJETS
- De nombreux autres projets de torpilles pour U-Boot sont
envisagés avant et pendant la guerre. L'un d'eux porte sur
un système de propulsion à cycle fermé,
utilisant le principe de Kreislauf, dans lequel un
mélange d'oxygène et de gaz d'échappement
est introduit dans un moteur conventionnel. Les
expériences commencent au début des années
1930 et, en 1937, le fabricant de moteurs d'avion Junkers obtient
un contrat de développement. La torpille M5
proposée a un diamètre de 750 mm et aurait
été propulsée par un moteur à cycle
fermé de 425 ch, mais ce projet est abandonné et le
moteur est redessiné pour s'adapter à une torpille
de 533 mm. Quarante moteurs sont construits et quelques essais de
torpilles entrepris lorsqu'en 1943, il est décidé
de concentrer tous les efforts de développement sur les
torpilles Walter.
- Un autre concepteur de torpilles, le Dr Kauffmann, met au point
un entraînement de torpilles à cycle fermé,
utilisant un moteur Otto. Les travaux se déroulent de
manière très prometteuse jusqu'à la veille
de la guerre, lorsque Kauffmann, un Juif, est contraint de
quitter l'Allemagne et que le développement cesse. Une
torpille propulsée par une fusée, appelée
Hecht (brochet) est également envisagée,
bien que l'on ne sache pas si elle se serait avérée
réalisable à la lumière des connaissances
hydrodynamiques de l'époque.
- D'autres efforts de développement portent sur les
systèmes de guidage et un projet très ambitieux de
1944-45 vise à utiliser le guidage par le sillage, mais ce
domaine s'avère très complexe et n'est pas
perfectionné. La G7es Geier (vautour) est une
torpille qui tente de surmonter les défauts des torpilles
acoustiques passives, en utilisant un guidage acoustique actif
(1). Elle transmet trois impulsions par seconde à une
fréquence de 80 kc/s, donnant une portée
d'acquisition de 280 yards (250 mètres), et un écho
de retour au-dessus d'une valeur fixée est utilisé
pour actionner le gouvernail afin de tourner la torpille vers la
cible. Le Geier est presque au stade de la production en
Mai 1945, mais il est douteux que des problèmes tels que
les échos de surface aient été
résolus, bien qu'il semble qu'il puisse surmonter les
problèmes causés par les leurres bruyants (par
exemple, Foxer).
- L'un des projets de torpille les plus significatifs est le
G7es Lerche (alouette) (2), qui est relié à
l'U-Boot tout au long de son passage par un fil de cuivre
isolé qui sort simultanément de la torpille
(à travers l'arbre d'hélice creux) et du tube
lance-torpilles de l'U-Boot. Le Lerche est doté
d'un système de détection acoustique passif, qui
transmet des signaux par le fil à l'opérateur
à bord de l'U-Boot, lequel est mieux à même
de distinguer les différentes cibles et d'identifier les
échos parasites que tout autre dispositif
électronique de l'époque. Cinq ordres
différents peuvent être transmis par câble :
torpille à gauche, torpille à droite, gyroscope,
train de récepteurs acoustiques à gauche, train de
récepteurs acoustiques à droite. On pense que le
Lerche est installé sur un U-Boot à des fins
d'essai en 1945, mais il n'entre pas en production, bien que la
technique du filoguidage ait été largement
copiée dans de nombreux systèmes d'armes
après la guerre.
1) Il est initialement désigné Boje
(bouée).
2) Il n’y a pas de numéro.
Source : U-BOATS History, Development and Equipment
1914-1945 de David Miller.