U.S.S. "Jacob Jones"


U.S.S. Jacob Jones et U.S.S Claxton (© collection of Vallejo Naval and Historical Museum)
U.S.S. "Jacob Jones" et U.S.S "Claxton"(© collection of Vallejo Naval and Historical Museum)


Type
Destroyer de Classe "Wickes"
Chantiers de Construction
New York Shipbuilding Corporation à Camden (New Jersey)
Mise sur cale
21 Février 1918
Lancement
20 Novembre 1918
Mise en service
20 Octobre 1919
Caractéristiques techniques
Longueur : 95,78 mètres
Largeur : 9,44 mètres
Tirant d'eau : 2,81 mètres
Déplacement : 1160 tonnes
Propulsion
4 x chaudière à mazout
2 x turbine à vapeur Parsons
2 x hélice
Puissance : 24610 cv
Vitesse maxi
35 nœuds
Autonomie
3800 nautiques à 15 nœuds
Armement
4 × canon de 102mm
2 × canon de 76 mm
12 × tube lance-torpilles Mark 8 de Ø 533mm
Équipage
113 hommes en temps de paix
Commandant
Lt Cdr. H.D. Black USN
Victimes/Survivants
138/11

- L'U.S.S. "Jacob Jones" (DD-130) est mis sur cale par la New York Shipbuilding Corp. à Camden, dans le New Jersey, le 21 Février 1918 et lancé le 20 Novembre de la même année par Mme Cazenove Doughton, arrière-petite-fille du Commodore Jacob Jones, un héros de la guerre de 1812 contre la Grande-Bretagne. Le "Jacob Jones" est mis en service au chantier naval de Philadelphie le 20 Octobre 1919, quittant ce port pour sa croisière d'essais le 04 Décembre. Sa formation terminée à Pensacola, en Floride, le 03 Janvier 1920, le "Jacob Jones" appareille pour le Pacifique où il reste dix ans. Affecté à la Pacific Fleet Destroyer Force à San Diego, il passe ses premiers mois à opérer le long de la côte californienne avec des exercices anti-aériens et de tir avant d'entrer au Mare Island Navy Yard, près de San Francisco, pour un réaménagement et une réparation au mois d'Août. Temporairement placé en réserve, le "Jacob Jones" reprend le 18 Juin 1921 le service dans la Destroyer Force, où il reste jusqu'à son déclassement le 24 Juin 1922, ainsi qu'une grande partie de sa classe, suite à la signature récente du traité naval de Washington. Cela aurait pu être la fin de l'U.S.S. "Jacob Jones", comme cela s'avère pour beaucoup de ses sister-ships, mais le 01 Mai 1930, il est remis en service après huit ans passés dans la réserve et suit une formation d'escorte pour la nouvelle flotte de porte-avions de la marine américaine. Après un carénage à Mare Island en Novembre, le "Jacob Jones" appareille pour le Panama le 04 Février 1931 où il sert d'escorte au porte-avions d'escorte U.S.S. "Langley" avant de transiter par le canal de Panama pour des manœuvres dans les Caraïbes et puis dans la baie de Chesapeake. Le reste de l'été est passé avec la Destroyer Division 7 le long de la côte de la Nouvelle-Angleterre avant qu'il ne se rende au chantier naval de Boston pour y être réaménagée en Octobre. Le "Jacob Jones" passe les trois années suivantes en service dans la flotte, principalement dans les Caraïbe, le point culminant étant une mission d'escorte lors de la visite du président Roosevelt, le "Good Neighbor" (politique de bon voisinage), à Haïti au cours de l'été 1934. En Décembre, il entre au chantier naval de Norfolk pour y être réaménagé, et devient un navire-école pour les aspirants de l'US Naval Academy (Académie navale américaine) d'Annapolis en Mai 1935. Le service dans la flotte de l'Atlantique se poursuit, le navire opérant d'abord à New York puis à Norfolk à partir de 1937, ses fonctions d'officer-training (formation des officiers) étant entrecoupées de manœuvres et d'exercices au large de la côte Est des États-Unis et dans les Caraïbes.
- En Octobre 1938, le "Jacob Jones" quitte Norfolk pour rejoindre le Squadron 40-T, qui, depuis Septembre 1936, est chargé de protéger les intérêts et les citoyens américains en Espagne pendant la Guerre Civile. Affecté principalement en Méditerranée occidentale, il faut attendre le mois d'Octobre de l'année suivante pour qu'il retourne aux États-Unis, la guerre ayant maintenant éclatée en Europe. Les patrouilles et les escortes se poursuivent le long de la côte Est et dans les Caraïbes jusqu'à son réaménagement à Norfolk au printemps 1940. En Avril de cette année-là, il rejoint la Neutrelity Patrol (patrouille de neutralité) dans l'Atlantique, puis est réaffecté à des tâches de formation des officiers en Juin et ensuite l'ordre d'aller à New London, Connecticut, en Septembre pour la formation au sonar anti-sous-marins à l'Atlantic Fleet Sound School qui se termine à Key West, en Floride, au début de la nouvelle année. Retour à la Neutrality Patrol en Mars 1941, il passe deux mois dans les eaux séparant Key West et le canal du Yucatan avant de rejoindre l'US Navy guard des îles de la Martinique et de la Guadeloupe, détenues par Vichy, dans les Antilles. Après un carénage de deux mois à Norfolk, le 01 Décembre, le "Jacob Jones" suit une formation d'escorte de convoi au large de la Nouvelle-Angleterre, après quoi il est transféré à Argentia, Terre-Neuve, le 12 Décembre à la Destroyer Division 54 du Destroyer Squadron27, de l'Atlantic Fleet. Sa première action a lieu alors qu'il escorte les dragueurs de mines "Albatross" et "Linnet" en route pour rejoindre le convoi SC 63 le 05 Janvier 1942, un contact sous-marin annonce une attaque aux charges en profondeur prolongée mais elle est sans succès. Son prochain convoi, le HX 169 vers l'Islande, est dispersé par une violente tempête le "Jacob Jones" se rend indépendamment à Hvalfjörður, pour se ravitailler en carburant malgré une panne de compas le 19. Le voyage du retour avec trois marchands subit des mésaventures similaires, le convoi se disperse dans une mer démontée. Le "Jacob Jones" atteint Argentia le 03 Février en compagnie d'un marchand norvégien, mais pas avant d'avoir effectué une deuxième attaque infructueuse sur un contact sous-marin. Une nouvelle mission de convoi avec l'ON 59 l'a amené à Boston pour des réparations le 08 Février, celles-ci sont achevées à Norfolk le 18. Entre-temps, les pertes catastrophiques de la marine marchande américaine amènent le Vice-Admiral Adolphus Andrews, commandant de l'Eastern Sea Frontier, à établir une patrouille anti-sous-marine itinérante au large des États-Unis qui, à son tour, amène le "Jakie" à sa dernière mission. Une première sortie, le 22 Février, donne lieu à une attaque sur un contact sous-marin près du bateau-phare "Ambrose", au cours duquel le "Jacob Jones", n'utilise aucune de ses cinquante-sept charges de profondeur. Cinq jours plus tard il appareille de New York pour la toute dernière fois.

- Parmi les dix-huit sous-marins qui ont reçu l'ordre de rejoindre les eaux américaines en Février 1942 dans le cadre de l'opération "PAUKENSCHLAG" («roulement de tambour») se trouve l'U-578 du Korvettenkapitän Ernst-August Rehwinkel. Son premier succès arrive au large du New Jersey lorsque le pétrolier sans escorte S.S. "R.P. Resor" est coulé à l'Est du Barnegat Light aux premières heures du 27 Février. Les U.S.S. "Dickerson" et "Jacob Jones", qui ont quitté New York cette après-midi-là pour une mission de recherche et de patrouille entre le Barnegat Light et Five Fathom, aperçoivent l'épave en feu. Le "Jacob Jones", récemment affecté à la patrouille anti-sous-marine, fouille les environs à la recherche de survivants pendant deux heures mais n'en trouve aucun. Il reprend ensuite sa route vers le Sud du Cape May et des Delaware Capes, en faisant part de sa position dans la soirée du 27 avant de commencer le silence radio. On n'entendit plus parler de lui et, malgré le sauvetage d'une poignée de survivants, il a fallu capturer des enregistrements allemands pour que les circonstances précises de sa perte soient révélées. Celles-ci montrent que l'U-578 s'approche du navire ennemi vers 10h25 heures (04h25 heures de navigation) le 28, permettant ainsi au Korvkpt. Rehwinkel la possibilité de faire une deuxième victime en vingt-quatre heures. Ne sachant toujours pas s'il s'agit d'un croiseur ou d'un destroyer, Rehwinkel met l'U-578 en position de tir et peu avant 11h00, il touche sa cible en la frappant deux fois.
- Extrait du KTB de l'U-578.




38°42'N 74°29'W selon une autre source


- La première torpille frappe le "Jacob Jones" sur bâbord, derrière le pont, provoquant apparemment une détonation secondaire dans la soute à munitions. L'effet de ces deux explosions quasi simultanées détruisent la chambre à cartes, le pont et les quartiers des officiers et des sous-officiers - en effet "Tout ce qui se trouve à l'avant du point d'impact est cisaillé et coule rapidement". Comme le confirme Rehwinkel, la seconde torpille frappe presque simultanément "à environ 40 pieds en avant de la plage arrière et franchit tout ce qui se trouve au-dessus des hélices et détruit les quartiers de l'équipage situés dans cette section". Selon les mots d'un survivant, "la cheminée numéro 1 et le pont ont disparu. La cheminée numéro 2 est posée contre le rouf de la cuisine, et le pont au-dessus de la salle de chauffe 1 s'est rapproché du rouf de la cuisine. Le pont au-dessus des compartiments avant s'est retrouvé contre le nid de mitrailleuse au-dessus de la salle des machines. L'état du navire ne laisse aucun des survivants dans le doute sur le fait que son sort est scellé et le fait que tous ses officiers soient immédiatement tués ou dans l'incapacité d'effectuer toute mesure de contrôle des avaries. Mais étonnamment, compte tenu de son âge et de l'ampleur des dégâts infligés, le "Jacob Jones" reste à flot pendant environ une heure après l'attaque et ce n'est qu'à 06h00 qu'il se renverse et coule.
- Une entrée du Eastern Sea Frontier War Diary de Mars 1942 fait état de l'incertitude quant aux circonstances de la perte du " Jacob Jones" et s'attarde sur la possibilité que "les Allemands aient capté un signal secondaire de la radio utilisée pour la veille". Le journal de Rehwinkel ne mentionne aucune aide de ce type, mais une autre observation du journal de guerre est plus proche de la vérité :
   On ne peut pas savoir avec certitude dans quelle mesure la malchance a contribué à son naufrage. La veille normale était réglée et "apparemment en alerte". Aucun homme n'a vu aucune trace d'un sous-marin et aucun homme n'a même vu le sillage des torpilles avant qu'elles ne frappent. Il est tout à fait possible que la rencontre entre le destroyer et l'U-Boot étaient tout simplement malchanceux.
- Il est peut-être ironique que le "Jacob Jones" partage avec son homonyme le DD-61 la distinction douteuse d'être le premier destroyer américain perdu au profit de l'U-Boot-Waffe après l'entrée en guerre des États-Unis, ce dernier ayant été coulé par le premier U-53 le 06 Décembre 1917.
- Le DD-130 a également été le premier navire de guerre américain perdu au combat dans les eaux côtières de l'Atlantique, le DD-61 étant le premier destroyer américain jamais perdu face à l'ennemi. Leur mémoire s'est perpétuée sous la forme d'un destroyer d'escorte de classe "Edsall" du même nom lancé en Novembre 1942 (DE-130) avec un U.S.S. "Black" et un U.S.S. "Marshall" de la classe "Fletcher" (DD-666 et DD-676), lancé en Mars et Août 1943 en l'honneur du Lt Cdr Hugh Black et du Lt Cdr Thomas W. Marshall Jr qui ont perdu la vie respectivement en tant que commandant et officier exécutif (XO) du deuxième "Jacob Jones". Son épave repose dans 120 pieds (≈ 36,50 mètres) d'eau, une masse d'épave tordue. La partie arrière est presque méconnaissable. La section médiane est à la verticale. Les chaudières et le moteur sont toujours visibles, bien que la plupart des plaques de coque semblent avoir été soufflées. Les tubes lance-torpilles de la section médiane contiennent encore des torpilles. Des obus sont souvent trouvés dans le sable et l'épave environnante. La proue est sur le côté formant un relief d'environ 10 pieds (≈ 3 mètres). La visibilité est généralement très bonne, parfois au-dessus de 100 pieds (≈ 30,50 mètres), avec une moyenne de 30 pieds environ. Elle est régulièrement visitée par des poisson-lune, des tortues et des thons.

- La grande majorité de l'équipage du navire du "Jacob Jones" a connue une fin rapide, tuée instantanément lors des détonations primaires et secondaires causées par les deux torpilles de l'U-578 ou emportée au fond dans l'étrave sectionnée. Le seul officier enregistré comme ayant survécu aux explosions, l'Assistant Engineer Ensign Norman C. Smith, "a été si gravement blessé qu'il a été pratiquement incohérent jusqu'à sa mort". Ceux qui ont survécu, tous de la section intermédiaire à l'exception du Machinist's Mate 2/c Thomas R. Moody (le seul évadé de la salle des machines arrière), a tenté d'abandonner le navire mais n'a pas trouvé la tâche facile car il n'y avait pas assez d'hommes valides disponibles pour mettre à l'eau les bateaux de sauvetage, leurs efforts entravés par des débris, des gréements mal fixés et de grandes quantités de pétrole sur le pont. Une trentaine d'hommes se sont finalement échappés à bord de six radeaux, mais celui contenant le Radioman 3/c Albert E. Oberg et deux autres a échappé de justesse à la traînée de l'épave :
   Près de l'extrémité avant de ce qui restait du navire, nous avons été coincé par du métal déchiqueté. Dans la lutte pour descendre, nous avons perdu nos pagaies et avons dérivé en demi-cercle autour de ce qui restait de la poupe. Juste avant qu'il ne coule la poupe a commencé à s'élever et nous avons dérivé vers elle. Les arbres d'hélice sont restés coincés au-dessus de nous comme des baguettes géantes. Un morceau de coque est venu sous notre radeau et a commencé à nous soulever. Nous nous sommes libérés quelques minutes avant que ça ne s'écroule. Au fur et à mesure en bas, le remous nous a fait sortir et nous a libérés de l'épave.
- Cependant, une autre catastrophe attendait les occupants des radeaux les plus bondés. Dans un témoignage fourni au 4th Naval District Intelligence Office de la base aéronavale américaine de Cape May, New Jersey, le lendemain (01 Mars), le MM 2/c Moody, qui avait été transporté par avion dans l'après-midi du naufrage, a déclaré :
   Qu'il a abandonné le navire dans un radeau de sauvetage, qui avait été jeté par-dessus le côté tribord. Que ce radeau contenait 15 autres membres de l'équipage, dont l'Ensign Smith. Que lorsque le navire a coulé ce radeau si près de lui que lorsque les grenades sous-marines ont explosé, elles se sont retrouvées juste sous le radeau. Que beaucoup d'hommes sur le radeau ont été fatigués par ces terribles commotions ; et que finalement, seuls 3 des 15 premiers ont survécu.
- Les mêmes détonations ont fait des victimes sur d'autres radeaux en jetant leurs occupants à l'eau.
- Aucun signal de détresse n'a pu être émis, et l'approche d'un front météorologique ce matin-là aurait très probablement condamné les survivants s'ils n'avaient pas été repérés par un avion de reconnaissance de l'armée américaine à 08h10 - trois heures après l'attaque et avant même que le "Jacob Jones" ne soit porté disparu. Le pilote a signalé l'observation et la position approximative des survivants à une station côtière et à l'U.S.S. "Eagle 56", un navire à coque en bois de l'Inshore Patrol. Deux navires de sauvetage ont été envoyés de Lewes et un canot de sauvetage d'Indian River Inlet (tous deux dans le Delaware), mais seul l'"Eagle 56" a sauvé quelques survivants, recueillant douze hommes dans les quatre heures suivant l'attaque, dont un a succombé avant d'atteindre le Cap May. La détérioration des conditions météorologiques force l'"Eagle 56" à interrompre les recherches à 11h00 et une opération de localisation d'autres survivants au cours des quarante-huit heures suivantes n'ont pas réussi à augmenter le nombre d'hommes, il est maigre : onze.



Libre traduction par l'auteur du site des pages 208, 209, 210 et 211 de l'ouvrage "U-Boat Attack Logs" de Daniel Morgan & Bruce Taylor chez Seaforth Publishing.
Sources : le Net


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