H.M.S. "Mahratta"


Le Mahratta en Août 1943 peu avant son premier convoi vers la Russie (© IWM)
Le H.M.S. "Mahratta" en Août 1943 peu avant son premier convoi vers la Russie (© IWM)


Type
Destroyer de Classe M
Commandé
07 Juillet 1939
Chantiers de Construction
Scotts Shipbuilding and Engineering Company Greenock, Écosse
Mise sur cale
18 Août 1941
Lancement
28 Juillet 1942
Mise en service
08 Avril 1943
Caractéristiques techniques
Longueur : 110,50 mètres
Largeur : 11,12 mètres
Tirant d'eau : 4,52 mètres
Déplacement : 1 965 tonnes
Déplacement maxi : 2 885 tonnes
Propulsion
2 x chaudière Admiralty
2 x ensemble turbo-réducteurs Parsons
2 x hélice
Puissance : 48 000 ch
Carburant
537 tonnes de mazout
Vitesse maxi
36 nœuds
Autonomie
5 500 nautiques à 15 nœuds
Armement
3 x 2 canon de 120mm
1 x canon de 102mm A.A.
4 × canon QF de 40 mm Mk.VIII L/39 (monture quadruple Mk.VIII)
2 × canon AA simples de 20 mm Oerlikon
12 × mitrailleuse Vickers AA de 12,7 mm (2 × montures quadruples & 2 × montures doubles Mk.III)
4 × tube lance-torpilles de Ø 533 mm (monture quadruple Mk.IX)
2 × lanceur et 2 × supports pour 42 × charges de profondeur
Détection
ASDIC Type 128
Radars Type 285 et 290
Équipage
225 hommes
Commandant
Lt Cdr. E.A.F. Drought DSC RN
Victimes/Survivants
220/17

- Le H.M.S. "Mahratta" commence sa vie sous le nom de "Marksman", puis est rebaptisé en reconnaissance du soutien financier apporté à l'effort de guerre par le gouvernement indien et en hommage à la brigade Mahratta de l'armée indienne qui s'est distinguée contre les Italiens lors de la campagne d'Abyssinie de 1940-1. Il aurait pu tout aussi bien porter le nom de la ville de Walsall, dont la Warship Week de Février 1942 a permis de réunir une partie des 700 000 £ nécessaires à sa construction. Mis sur cale à Scotts of Greenock en Janvier 1940 (18 Août 1941 selon d'autres sources), le "Mahratta" n'est lancé qu'en Juillet 1942 en raison des dégâts causés par les bombes en Mai de l'année précédente, qui ont nécessité le démontage de la coque et la réfection de la quille. Lorsqu'il est achevé en Avril 1943 - une gestation aussi longue que celle de n'importe quel destroyer britannique pendant la guerre - le "Mahratta" est baptisé 'le bateau Blitz'. Après une mise au point à Scapa Flow, le "Mahratta" est affecté à la 3rd Destroyer Flotilla de la Home Fleet, participant à la relève de la garnison britannique du Spitzberg en Juin 1943, puis à la série de feintes vers la Norvège destinées à détourner l'attention de l'invasion de la Sicile en Juillet. En Août, il effectue son premier voyage vers la Russie du Nord, en l'occurrence un ravitaillement de la baie de Kola par le 10th Cruiser Squadron et son escorte. Une autre mission d'escorte amène le "Mahratta" dans le Golfe de Gascogne en Octobre, d'où il accompagne le cuirassé endommagé "Valiant" à Plymouth. Un deuxième voyage d'approvisionnement à Kola lui permet de rejoindre l'escorte du convoi de retour RA 54A qui part de Murrnansk le 01 Novembre. Après un carénage à Hull entre Novembre et Janvier de l'année suivante, le "Mahratta" se dirige vers le Nord pour escorter le convoi JW 56B jusqu'à Mourmansk puis le RA 56 de retour, se détachant pour rejoindre le JW 57 le 22 Février.

- Malgré l'engagement de plus de deux douzaines de U-Boote sur le théâtre arctique - un théâtre que Dönitz considère, comme la Méditerranée, comme une distraction inutile du principal champ de bataille de l'Atlantique - les résultats obtenus au cours des cinq premiers mois de 1944 constituent une triste explication pour la marine allemande. La poignée de navires marchands coulés est largement dépassée par l'attrition de la F.d.U. Norwegen (officier commandant des U-Boote, Norvège) qui a perdu dix-huit bateaux au cours de la même période. Les victimes alliées de cette campagne sont de plus en plus les escortes, qui se révèlent trop nombreuses et trop bien équipées pour que les U-Boote puissent les contourner, même sous le couvert de l'obscurité. Le convoi JW 57 à destination de Mourmansk en Février 1944, composé de quarante-trois navires et d'une escorte de dix-neuf bâtiments, ne fait pas exception. Bien qu'une meute de pas moins de quatorze bateaux "Werwolf" est formée pour entraver sa progression, aucun navire marchand n'est coulé tandis que les Allemands perdent l'U-713 (détruit par le H.M.S. "Keppel" le 24) et l'U-601 (bombardé par un "Catalina" de la RAF le 25). Malgré de nombreuses affirmations basées sur des données acoustiques suite à des détonations de fin de course de Zaunkönig, la seule perte subie par les Alliés est celle du H.M.S. "Mahratta" par l'U-990. L'épisode illustre la frustration ressentie par l'U-Boot-Waffe face à l'efficacité de la défense des convois. Le journal de guerre du Kptlt Hubert Nordheimer raconte comment il a rapidement abandonné tout espoir de passer l'escorte et a préféré attaquer un destroyer sur la hanche tribord du convoi. Contrairement aux autres bateaux du groupe "Werwolf", Nordheirner est resté en surface pour constater les résultats de son attaque avec sa Zaunkönig.
- Extrait du KTB de l'U-990.




ou



- L'effet de la torpille de l'U-990, tirée à 20h55, heure locale, est peut-être moins important que prévu, la commission d'enquête (Board of Enquiry) indiquant que 'le choc a été léger et a provoqué l'arrêt instantané des deux moteurs'. Bien qu'il y ait une incertitude quant au type de torpille utilisée, le fait qu'elle ait frappé près des hélices a fait naître le soupçon qu'il s'agissait d'une GNAT (German Naval Acoustic Torpedo - le terme britannique pour la T5/ Zaunkönig), ce qui est confirmé dans le journal de bord de l'U-990. Le journal de bord corrobore également les rapports alliés faisant état d'une violente explosion environ cinq minutes après la première qui a détruit la poupe du "Mahratta". Bien que la thèse de Nordheimer d'une détonation de charge de profondeur semble peu probable, aucune conclusion ferme n'a été tirée par les Britanniques quant à sa cause. L'impression de ceux qui ont assisté à la scène de loin était qu'une soute à munitions avait explosé, le navire se soulevant 'comme une fusée' dans une énorme explosion. Bien que ce point de vue ait été soutenu par plusieurs survivants du "Mahratta", tous n'ont pas considéré la seconde explosion comme aussi puissante que la première, ce qui a conduit le Lt Cdr Philip Bekenn (commandant du H.M.S. "Impulsive") à la conclusion non fondée qu'une chaudière avait explosé. Les preuves disponibles ont amené la commission d'enquête à privilégier une explosion de la soute à munitions, mais même cette hypothèse a été contredite par le directeur de la construction navale, Sir Stanley Goodall, qui n'a trouvé 'aucune preuve définitive' d'un tel événement. La suggestion de la commission d'enquête que l'explosion était due à une deuxième torpille a été perpétuée dans les comptes rendus ultérieurs de la perte du "Mahratta", mais la question est réglée dans les archives allemandes qui montrent clairement que l'U-990 ne s'est pas seulement limité à une seule torpille, mais qu'il était le seul bateau en contact avec le convoi à ce moment-là. Quelle qu'en soit la cause, la seconde explosion 'a inondé tous les compartiments arrière, y compris la salle des machines et peut-être la salle des moteurs, ce qui a provoqué une forte gîte sur bâbord'. Le Petty Officer (quartier-maître) Charle Smith était de quart dans la salle des chaudières n°2 :
   Je n'avais pas encore quitté le tube acoustique (transmetteur d'ordres) que la deuxième explosion s'est produite. Toutes les lumières du navire se sont éteintes et j'ai alors pris en main la meilleure chose à faire. Le navire a commencé à gîter sur bâbord, j'ai stoppé la chaufferie et je suis monté en haut. Tout était sombre et je ne pouvais pas voir. Il y avait des débris partout. J'ai alors crié à la salle des machines pour voir si quelqu'un était de garde. Le navire a alors pris une gîte plus importante sur bâbord.
Couché sur bâbord et sur l'arrière, le "Mahratta" est resté à flot pendant plus d'une heure. Bien que tout espoir de le sauver semble avoir été abandonné, les circonstances ont empêché un abandon ordonné du navire. D'une part, même une épave était préférable à une dérive dans l'océan Arctique par une nuit d'hiver. De plus, l'absence de mention des embarcations du navire dans les documents qui subsistent suggère qu'elles ont été détruites ou qu'elles n'ont pas pu être mises à l'eau, et une grande partie de l'équipage a consacré son énergie à libérer les flotteurs Carley gelés avant la fin. À 22h20, le H.M.S. "Mahratta" a soudainement basculé sur ses extrémités et a coulé la poupe en premier, environ quatre-vingts minutes après le coup de Nordheimer.

- La nature des détonations et la vitesse à laquelle le "Mahratta" a fini par chavirer ont rendu inévitable un lourd bilan à une latitude aussi élevée, même après qu'un certain nombre de flotteurs Carley aient été libérés. Le H.M.S. "Impulsive" est arrivé sur les lieux à 21h52 dans des conditions de blizzard et attendait 'un moment propice entre les bourrasques de neige pour se ranger le long du bateau' lorsque le "Mahratta" a signalé que la fin était proche à 22h19. Le Lt Cdr Bekenn a approché le H.M.S. "Impulsive" aussi près qu'il l'a osé lorsque le "Mahratta" a chaviré et coulé, mais peu d'hommes se trouvaient dans les Carleys et il s'est avéré très difficile de secourir les 'personnes qui se débattaient, englués et aveuglés par le mazout et rapidement paralysés par le froid'. Une forte houle, un vent mordant et une neige battante ont rendu les manœuvres difficiles tandis que les hommes succombaient dans une mer proche du point de congélation et des thermomètres affichant - 5°C (23°F). Les frustrations liées aux efforts de sauvetage dans de telles conditions ont été longuement évoquées par le Lt Cdr Bekenn dans son témoignage devant la Commission :
   Il est très triste de constater qu'une fois dans l'eau, aucun survivant ne semble pouvoir faire le moindre effort pour nager vers le navire. Des radeaux Carley ont été mis à la dérive, mais il s'est avéré qu'ils étaient vides, avec seulement un ou deux hommes dans chacun d'eux ... Après avoir terminé la première dérive sous le vent, le navire a manœuvré vers le vent, mais à ce moment-là, seuls ceux qui se trouvaient dans les radeaux Carley étaient en vie. J'ai été stupéfait lorsque nous n'avons compté que 17 survivants, mais je sais que ceux qui étaient sur le pont et dans la baleinière ont fait tout leur possible. Il est difficile de ne pas tenir compte de 3 ou 4 survivants et d'en chercher 20, mais c'est peut-être un objectif à atteindre. Dans notre cas, la visibilité était telle que l'on ne pouvait compter que sur les cris et le plus grand nombre de feux rouges.

- Comme l'a raconté Bekenn, l'équipage de l'"Impulsive" a fait de son mieux pour aider les survivants, descendant des filets de sauvetage pour aider les rares personnes qui avaient assez de force pour atteindre le côté du navire alors qu'il était emporté par la houle. Deux hommes, les Able Seamen (matelots de 2e classe) John Riggs et James Wells, ont été félicités pour s'être portés volontaires 'pour être descendus dans un flotteur Carley dans une forte tempête de neige pour tenter de sauver des survivants, sachant parfaitement que si leur navire entrait en contact avec un ennemi, ils devraient être abandonnés'. Battus par des vagues glacées, Riggs et Wells étaient inconscients lorsqu'ils ont été hissés à bord, et ont été les derniers à être secourus. Tous deux ont été cités dans les Dépêches (Rapport officiel, lettre de félicitation).
- Une nouveauté sinistre du naufrage fut le fait que l'épisode entier, de l'attaque au chavirement, fut diffusé au reste du convoi par le radiotéléphone du "Mahratta". Le commentaire, présumé avoir été fait par le Lt Cdr Drought lui-même, se terminait par les mots 'Nous abandonnons le navire. Nous coulons. Nous ne pourrons pas tenir longtemps'. Cette transmission, annonçant la mort de plus de 200 hommes (y compris celle de Drought, qui n'a pas tenté de quitter le pont du "Mahratta"), est restée dans la mémoire de tous ceux qui ont dû la subir. Le Lt Cdr Bob Whinney, commandant du H.M.S. "Wanderer", a plus tard enregistré sa propre impression de l'épisode : 'Personnellement, du point de vue de l'impuissance et de l'angoisse, l'incident du "Mahratta" était comparable aux terribles moments où les survivants du "Laconia" étaient mitraillés près de l'île de l'Ascension et à l'horreur stupéfiante suscitée par la nouvelle du naufrage du puissant Hood'.



Libre traduction par l'auteur du site des pages 386, 387, 388 et 389 de l'ouvrage "U-Boat Attack Logs" de Daniel Morgan & Bruce Taylor chez Seaforth Publishing.
Sources : le Net


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