Contexte de l'attaque



- En Décembre 1941 le B.d.U. alerté, par des agents locaux du départ imminent du convoi HG 76 de Gibraltar pour la Grande-Bretagne, forme une ligne de patrouille avec le groupe "Seeräuber pour l'intercepter. Ce groupe est renforcé de six autres bateaux, parmi eux l'U-751 (K.L. Gerhard BIGALK).
- En anticipant une attaque majeure, l'Amirauté a retardé l'appareillage du convoi jusqu'à ce qu'un groupe d'escortes soit suffisamment puissant ait été rassemblé pour faire face à la menace. Le convoi a finalement levé l'ancre le 14 avec une escorte renforcée autour du 36e Escort Group du remarquable Cdr F. J. 'Johnnie' Walker.
- Cette escorte est composée entre autres des sloops H.M.S. "Stork" et H.M.S. "Deptford", des corvettes de Type "Flower" (H.M.S. "Campion", "Carnation", "Coltsfoot", "Convolvulus", "Gardenia", "Jonquil", "La Malouine", "Marigold", "Samphire", "Vetch"), des destroyers H.M.S. "Blankney", "Exmoor" et "Stanley" du Commandement de l'Atlantique Nord et pour la couverture aérienne le H.M.S. "Audacity", même si cette couverture est réduite à quatre appareils utilisables.
- Limité à une vitesse de 7,5 nœuds, le convoi HG 76 fait route vers le groupe "Seeräuber" qui navigue vers le Sud le long de la côte marocaine. Et ce n'est que le 16 Décembre que les allemands prennent contact.
- Les tactiques agressives adoptées par Walker, la taille de l'escorte et les "Martlet" de l'Audacity limitent les attaques des U-Boote.
- De nombreuses pertes humaines sont à déplorer et c'est du côté allemand qu'elles sont supportées tout d'abord; deux "Condor" sont abattus par les "Martlet" de l'Audacity; le 17 Décembre l'U-131 (K.K. Arend BAUMANN) qui se saborde sous le feu intense de l'escorte du convoi après avoir été endommagé par des attaques aux charges de profondeur et par un des "Martlet", un autre est abattu; l'U-434 (K.L. Wolfgang HEYDA) est envoyé par le fond le 18 Décembre, et bien que le groupe "Seeräuber" réussit à couler le H.M.S. "Stanley" au petit matin du 19, l'U-Boot qui l'a envoyé par le fond, l'U-574 (O.L. Dietrich GENGELBACH) est lui aussi coulé par le H.M.S. "Stork".
- À Kernével, le B.d.U. est convaincu que le porte-avions d'escorte (qu'il pense être le H.M.S. "Unicorn", qui embarque trente-six appareils) est l'obstacle principal et exhorte ses commandants qui sont sur zone d'en faire leur principale priorité.
- Informé par l'Amirauté que pas moins de six U-Boote sont au contact du convoi HG 76, le soir du 21 Walker ordonne a quatre escorteurs d'organiser une simulation de bataille à l'arrière du convoi en utilisant des obus éclairants, des fusées éclairantes et des charges de profondeur pour distraire les U-Boote lorsque le convoi change de route.
- Cependant la tactique échoue, lorsqu'un bâtiment marchand tire une fusée éclairante, ce qui illumine le convoi maintenant faiblement défendu.
- Le K.L. Engelbert ENDRASS, commandant de l'U-567, frappe d'abord le cargo S.S. "Annavore", chargé d'une cargaison de minerai, juste avant 20h30 (heure britannique). La lumière de la fusée éclairante tombe à quelques nautiques sur le tribord du H.M.S. "Audacity", ce qu'a conclu une commission d'enquête (Board of Enquiry) donnant sa position à l'ennemi. Cependant le K.L. Gerhard BIGALK, commandant l'U-751, révèle qu'il a déjà repéré le porte-avions d'escorte lors de l'illumination artificielle due aux fusées éclairantes.
- Extrait du KTB de l'U-751.
- Des quatre torpilles tirées à 21h37 le 21 Décembre, une seule est un coup au but, détonnant dans la salle des machines à 20h35 (heure britannique). Le compte rendu de l'Audacity situe le coup au but quelques minutes plus tard. Des dégâts importants sont causés à la coque de l'Audacity, mais le navire n'est pas encore en danger de couler tant que la cloison de la salle des machines tient. Il y a des rapports, bien que l'arrière du navire s'enfonce, qui signalent que les canons n°1 et n°2 tirent sur un sous-marin en surface sur son bâbord, ce qui n'est pas confirmé ni par les sources officielles ni par le KTB de Bigalk. Cependant, en quelques minutes, une petite cloison dans le tunnel de la ligne d'arbre s'effondre, inondant les diesels et causant une défaillance totale de l'alimentation électrique.
- Son incapacité à manœuvrer une fois que les moteurs sont arrêtés fait de l'Audacity une cible facile pour une deuxième attaque et le Commandant MacKendrick a peu d'illusion de le sauver.
- L'attaque suivante de l'U-751, enregistrée à 21h45, scelle le destin de l'Audacity, les deux torpilles détonnent à l'avant à quelques secondes d'écart en brisant la quille du porte-avions. Bien que Bigalk enregistre une autre détonation, il n'y a aucune confirmation à moins que l'écart de vingt secondes entre les deux détonations enregistrées par T. Pearson soit considéré comme preuve d'un coup au but suivi par une détonation par sympathie. En tous cas l'Audacity coule vers 22h10 son arrière pointant vers le ciel.
- Deux aspects du naufrage d'Audacity ont fait l'objet de débats, tant au sein du Conseil d'enquête que dans les évaluations suivant l'événement. Le premier est la décision de MacKendrick de retirer son navire du corps principal du convoi, malgré l'absence d'escorte. Bien que cette action soit conforme aux Instructions des convois dans les Western Approaches, le Cdr Walker, qui a six ans de plus d'ancienneté que MacKendrick, regrette de ne pas avoir ordonné à l'Audacity de rester sur bâbord ou au centre du convoi et met en doute l'opportunité de permettre à un navire si précieux de s'éloigner dans la nuit. Ce point de vue est approuvé par le Capitaine (D) à Liverpool, mais la suggestion est rejetée à la fois par le Conseil et par l'amiral Sir Percy Noble, commandant en chef des Western Approaches. Ce dernier réitère le fait que les dispositions tactiques de l'Audacity sont une question pour son commandant tandis que le Conseil appuie la décision de MacKendrick de quitter le convoi après qu'une grande partie de son escorte se soit retirée. En outre, comme Noble le précise, en restant dans le convoi il y a toute garantie de sécurité: « Il est intéressant de noter que lors d'une attaque précédente lorsque l'Audacity était en convoi, une torpille est passée à vingt-cinq mètres derrière lui et pendant qu'il sortait du convoi, un navire marchand dans son position a été coulé ». La sagesse de la manœuvre de diversion de Walker et l'illumination du convoi est un autre aspect pour attirer l'attention, bien que le Conseil conclue que cela avait été un tournant malheureux mais inévitable. En fait, le journal de guerre de Bigalk montre que la fusée éclairante n'a joué aucun rôle pour l'alerter de la position de l''Audacity puisqu'il l'avait déjà aperçu. En effet, en l'obligeant à tirer avant qu'il ne soit prêt, l'incident a causé la sous-estimation de plusieurs coordonnées clés et envoyé trois de ses quatre premières torpilles à l'écart de la marque.
- Bien que Bigalk reçoive la Croix du Chevalier lors de son retour à St Nazaire, toute satisfaction à son succès et contrebalancé par la perte de cinq U-Boote (y compris l'U-567 (K.L. Engelbert ENDRASS), coulé par les H.M.S. "Deptford" et "Samphire" en même temps que l'Audacity) [1]. Avec seulement deux bâtiments envoyés par le fond et un deuxième navire de guerre (le H.M.S. "Stanley") et cela en une semaine de lutte au cours de laquelle une douzaine de commandants se sont battus. Pire encore de la perspective allemande est le précédent fixé par le rôle de l'Audacity dans les quatre convois escortés par lui, un développement avec des conséquences profondes pour la protection des bâtiments de commerce dans la Bataille de l'Atlantique.

- Devant le manque de défense de l'Audacity après le premier coup au but de l'U-751 MacKendrick n'a d'autre alternative que d'ordonner l'abandon du navire, les flotteurs Carley et les canots de sauvetage du navire sont mis à l'eau entièrement équipés. Un survivant, le Lt Cdr W. E. Higham, signalera plus tard, au moment où la deuxième et la troisième torpille ont frappé la majeure partie de l'équipage avait quitté le navire avec la perte d'un seul homme. Cependant, cette deuxième attaque est d'un ordre différent de la première. T. Pearson vient juste de tirer une roquette du pont quand il aperçoit l'ennemi :
- « J'ai entendu s'approcher deux torpilles signalées du pont d'envol. J'ai vu le sous-marin presque sur le barrot à environ 3½ à 4½ encablures. Je pouvais voir les deux torpilles arriver vers le navire, alors j'ai sauté sur le pont tribord parce que je pensais que le pont d'envol s'effondrerait, ce qui l'a fait ».

- Brisé par un coup au but majeur, l'arrière de l'Audacity s'élève brusquement et ceux qui sont encore à bord commencent à abandonner le navire. Les amarres coupées, les "Martlet" de l'Audacity dérapent sur le pont d'envol déformé, obligeant les hommes à sauter par-dessus bord. Quinze minutes après la deuxième attaque de Bigalk, tout est fini, ceux qui sont encore bord, ils ne leur restent que très peu de temps en terme de survie. Au moment où les H.M.S. "Pentstemon", "Marigold" et "Convolvulus" recueillent les derniers survivants deux heures plus tard dans une nuit exceptionnellement sombre, plus de soixante-dix hommes d'équipage ont perdu leur vie, le plus souvent présumés noyés, avec seulement deux pilotes de l'Audacity survivants. Une des victimes est le Cdr MacKendrick, bien qu'il ait été à deux doigts d'être sauvé. Le voyant s'approcher du côté du H.M.S "Pentstemon", le Premier Lieutenant a grimpé pour le sécuriser, mais le navire a roulé, frappant MacKendrick à la tête, ce qui l'a noyé.
- Le H.M.S. "Audacity" a coulé à la position : 43°45'N 19°54'O.

Position du naufrage du H.M.S. Audacity


[1] L'U-127 (K.L. Bruno HANSMANN), l'U-131 (K.K. Arend BAUMANN), l'U-434 (K.L. Wolfgang HEYDA), l'U-574 (O.L. Dietrich GENGELBACH) et l'U-567 (K.L. Engelbert ENDRASS).

Libre traduction par l'auteur du site des pages 171, 173 et 174 de l'ouvrage "U-Boat Attack Logs" de Daniel Morgan & Bruce Taylor chez Seaforth Publishing.

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